Chers amis,
Malgré la relative discrétion des médias de la France, semble t-il, sur la tempête tropicale Hubert à Madagascar et
dans la région de Mananjary en particulier, vous êtes nombreux à vous inquiéter pour nous. C'est vrai que Madagascar est loin! Nous vous en remercions vivement !
Il paraît néanmoins que la nouvelle a été dite tout de même en France métropolitaine avec ou sans images, je ne sais pas! Je
parle de la France métropolitaine car l'île de La Réunion n'est qu'à 800 km...et nous avons une météo quasi commune. Nous sommes donc plus ou moins concernés par les mêmes effets. D'ailleurs des
amis réunionnais me disent qu'ils ont pu voir des images de la situation chez nous et, si proches, se sentent profondément solidaires de ce que nous venons de vivre.
Justement, la France via l'île de La Réunion est venue à notre secours avec l'envoi de matériel par le transal militaire
basé sur l'île. J'ai pu l'apercevoir atterrir une fois. Deux rotations étaient prévues. J'ai du manquer la première...très occupé avec les gens qui travaillent avec moi pour déjà, au premier
"sursaut de calme", se remettre au travail.
Comme vous le savez sans doute pour ce type de phénomènes météorologiques, il y a une échelle qui va de la simple
perturbation jusqu'au cyclone tropical qui va de 1 à 5 (force des vents) en passant par la dépression et la tempête. C'est en devenant tempête que le phénomène prend un nom. Hubert était une
tempête tropicale de par la force des vents...mais qui nous a apporté beaucoup d'eau. Je vous mets en pièce jointe le relevé pluviométrique que nous faisons régulièrement sur HSA. Je pense que
cela montre bien pourquoi cette tempête a été une catastrophe. Du 2 au 9 mars, il avait déjà beaucoup plu: 595 mm. La tempête a elle même apporté 440 mm sur une terre déjà gorgée d'eau...et ça
continue encore ces jours puisque depuis le 12, nous avons encore eu 239 mm. 1274 mm sur une vingtaine de jours...
Plus que la force des vents qui a bien sûr provoquée chute d'arbres, destructions de cases, c'est cette eau qui a provoqué
les glissements de terrains et la force des courants qui ont détruit un certain nombre d'ouvrages et douloureusement emporté des vies. Telle une coulée de boue à 10 km d'HSA qui a traversé la
route et englouti une famille de 5 personnes. Ce n'est malheureusement pas un cas unique. Les autorités du pays sont venues sur place et les aides commencent à s'organiser tout en sachant que ça
ne remplacera jamais les pertes subies.
Les cultures ont bien sûr souffert. On venait de repiquer le riz, nourriture de base à Madagascar et nous sommes à la
limite du temps de repiquage. Encore faudra-t-il trouver le plant nécessaire. Lorsque le riz est sous l'eau, il peut résister 2 nuits pour reprendre vigueur ensuite; sinon tout est perdu. J'ai pu
voir qu'à certains endroits si les rizières n'ont pas été emportées et que l'eau s'est vite retirée, tout est encore possible. Par contre, en d'autres!...
Si un immédiat avec des aides est important, dans un pays comme le nôtre et à vocation agricole à la "culture" du riz, ce
sont les semaines et mois à venir que l'on redoute.
Évidemment, l'eau, l'électricité, le téléphone et Internet ont été coupé pendant plusieurs jours. Tout est aujourd'hui
rétabli...avec une eau qui n'arrive pas à monter à l'étage où je me trouve....
Sur à peu près une dizaine de district (anciennement sous préfectures et préfectures) touchés par la tempête, il semble
qu'il y ait à ce jour plus d'une cinquantaine de victimes.
Relié de nouveau avec "le monde" donc, mais pas avec le reste du pays car la RN 25 (la route qui passe le long d'HSA) qui va
de Mananjary à Fianarantsoa et Antananarivo est coupé à 70 km d'ici en plusieurs endroits sur plus d'une dizaine de km. La route a été complètement emportée. On y travaille, dit-on! Nous
l'espérons car c'est la seule "artère" qui permet d'acheminer ce que Mananjary et sa région ont besoin mais aussi le sud-est de l'île. Si ce n'est pas encore le cas, les PPN et les carburants ne
tarderont pas à manquer et ce qui reste atteindra des prix exorbitants.
Vous me posez des questions à propos d'HSA.
Déjà et c'est le plus important, aucun blessé ou victime à déplorer auprès des personnes ou de leurs proches qui travaillent
sur le site. Sinon des cases qui étaient "usées" par le temps et qui n'ont pas résisté. C'est malheureusement "local" de ne pas avoir su prévoir...qu'il y aurait du vent...Ce n'est pourtant pas
faute de le rappeler !...Dans le fond, ces personnes ont du travail et pourront mieux que d'autres s'en remettre.
A la résidence de l'évêché dans la ville de Mananjary, entourée par les eaux, dans l'un de mes magasins où j'entreposais du
matériel dont du linge pour le futur hôpital, tout "baignait" dans 50 cm d'eau. Cela fait maintenant plus de 10 jours que nous sortons tout, trions, jetons ce qui ne peut être récupéré, faisons
sécher lorsque le soleil fait de timide percées... Le site des 4 conteneurs pour le matériel plus gros n'a pas été touché.
Sur le site lui même, comme partout, il y a des éboulements et des coulées de terre. Pour ceux qui ont des photos de
l'ensemble, le barrage a heureusement fait ses preuves ainsi que le mur de soutènement le long de la RN. A première vue, trois mois de travail à reprendre...pour ce que nous étions justement en
train de faire et fait nouveau pour des choses qui semblaient terminées et tenir pour avoir eu à subir déjà la tempête Jade en avril 2009. C'est vrai que de mémoire, on n'avait pas vu autant
d'eau depuis bien longtemps. L'observation de ce que nous avons constaté va, encore une fois, nous permettre de mieux prévoir et surtout de faire en sorte qu'aucune construction future puisse
être mise en danger.
Comme à chaque fois, le fleuve Mananjary déborde et vient recouvrir l'ensemble des 3 ha de rizières dans les fonds du site.
Le niveau était plus haut cette année. L'eau n'est pas restée plus de 2 jours et le phénomène semble montrer qu'il pourrait en être ainsi à chaque crue. il faut retravailler néanmoins le départ
de ces eaux au niveau des digues du franchissement d'une colline à l'autre.
Je n'ai pas fait de photos cette fois-ci tant le découragement du moment était "fort". Lorsque j'ai "réagi", je me suis
aperçu que la pile de mon appareil numérique était épuisée et qu'il aurait fallu mettre le groupe en marche pour ça...J'ai donc laissé...
Dans ces difficultés du moment, je me réjouis de la venue des nos amis architectes de France, Jacques et Evelyne, qui vont
sur le site et bénévolement travailler près de 3 semaines. Ils sont arrivés à Tana ce matin... à point nommé ! J'espère bien dans quelques mois vous communiquer les plans définitifs de
l'ensemble.
Avec toute mon amitié et mes remerciements les plus chaleureux pour votre aide qui s'exprime de différentes manières au fil
du temps et le souci de ce beau projet que vous acceptez de porter avec nous!
Jean Yves